Quelle est l’origine de la musique ?

Par Yan Marchand
Docteur en philosophie et auteur

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L’être humain et la musique ont une histoire commune. L’un en va pas sans l’autre. L’origine de la musique, c’est l’origine historique. Des flûtes, des instrument de pierre, des marques dans les grottes qui ressemblent à des endroits intéressants sur le plan acoustiques, confirment ceci : l’humain est musicien. Il a crée la musique et sans doute que la réciproque est vraie. Homme est musique sont si bien liés que l’on évoque parfois, comme Rousseau par exemple, la naissance du langage par une indistinction entre musique et parole dans une musi-langue originaire.

 

La musique fait partie des arts

 

Mais il ne s’agit pas d’un action spontanée. La musique fait partie des arts, aussi est-il difficile de dire que les oiseaux chantent ou que l’eau de la rivière s’écoule dans une mélodie ou qu’il y aurait une symphonie de la mer ou des planètes. La musique trouve son origine dans un geste qui transforme les sons naturels en musique ? Quelle est la différence entre du son et de la musique. Car tout son n’est pas musical. Toute musique, jusque dans ses silences est sonore.

Qu’est-ce qu’un son, à partir de quand devient-il musique ? Un son vient de la vibration de l’air accompagné d’une sensation auditive. Il a surtout une propriété particulière : le son n’est généré que s’il arrive quelque chose. Une chaise tombe, un tasse se brise, le vent souffle dans les feuilles. Le son n’est donc pas la qualité d’un objet comme sa couleur ou sa forme, mais d’un évènement en train de se produire. Le son dit que quelque chose arrive (une chaise tombe) et comment cela arrive (quelqu’un courrait dans le salon, la chaise a été bousculée avant de tomber lourdement) Car le son déploie tout un univers de sons reliés : le bruit de la course, le souffle, le corps qui bouscule le bois de la chaise, les habitants étonnés poussent un cri lequel fait s’envoler une mésange et fuir le chat dans un bruit de plumes et de velours.

 

Le son est un système d’alarme

Le son est un système d’alarme car il annonce les évènements. Le repos est troublé, il convient de se mettre en alerte. Le son est donc, par définition, un univers émotionnel de tension, de vigilance et au bout d’un certain temps, quand on ne l’entend plus, de détente et de tranquillité. Le son par nature n’a rien de musical.
Il est d’autant moins musical qu’il est difficile de distinguer un son d’autre son. Quand commence-t-il, quand s’arrête-t-il ? Un glissando est-il une notre ou plusieurs notes ? Le son est indifférencié et donc rattaché à la masse de l’univers sonore. Nous pensons que le son est différencié par que c’est l’oiseau qui s’envole. Le son est celui de l’oiseau, mais le bruit de l’envol il commence bien avant mon écoute, se fond à d’autres éléments sonores et se prolongent indéfiniment. La nature produit un brouhaha informe. Si l’on fermait les yeux pour n’écouter que le son du monde, plus aucun son ne serait rattaché à sa cause. Dans une écoute pure tout est saturée.

Les signes musicaux travaillent une atmosphère

Ces identités sonores ont une autre qualité : elles sont expressives ? Mais qu’expriment-elles ? Des émotions ? Pas vraiment car la musique peut donner une ambiance, une humeur, mais elle n’ouvre pas un éventail émotionnel très vaste. Si nous entendons bien la tristesse, la gaieté, la colère… c’est plus difficile de mettre en musique le doute, le dégoût, la défiance plutôt que la méfiance et mille autres subtilités. Elle exprime donc plutôt des ambiances, une tonalité.
Elle exprime oui, mais pas forcément quelque chose. Une émotion est causée par quelque chose. La peur par le chien. En musique, l’émotion vient de la musique elle-même. Si on ne dit qu’Orphée a perdu son Eurydice, on ne peut pas savoir d’où vient cette tristesse d’un point de vue strictement musical. La musique ne désigne pas un monde, les signes musicaux travaillent une atmosphère.

La musique a quelque chose à nous faire vivre

Que nous dit l’atmosphère musicale, pourquoi nous touche-t-elle à ce point ? Il s’agit d’un univers imaginaire, peuplé d’unités, qui met l’auditeur dans un certain état, une certaine humeur.
Car la musique a quelque chose à nous faire vivre : la vie elle-même. En effet, la musique ne fonctionne pas comme le reste des évènements naturels. Si je pousse une dominé dans une rangé, je peux anticiper la suite. En musique cela semble différent. Nous ne pouvons entendre une note qu’après avoir entendu la suivante. On découvre toujours après coup ce qui s’est passé. Car c’est la différence ou l’écart avec une autre note qui fait la valeur. Une écoute musicale se fait toujours à rebours. Au passé. Dans le même temps, nous essayons d’anticiper la note à venir.

Nous avons là un phénomène temporel particulier : on se retourne et on projette sans cesse, comme si le temps surprenait, s’inventait sans cesse pour éviter la répétition et proposer des variations. Ce que j’entends vient du passé et fait masse pour rouler vers un avenir non défini. C’est pour cela que l’écoute musicale surprend. Sa richesse est totale. Qu’ai-je entendu, que vais-je entendre ? Ce mouvement rappelle curieusement le mouvement du vivant lui-même qui est le résultat de toute les expériences passées ; expériences que l’on intègre au fur et à mesure pour dessiner les conditions de possibilité d’un avenir. Bref, le temps s’invente, il ne reproduit pas, il ne répète pas. Le temps est un enfant qui joue, disait Héraclite.
Peut-être est-ce pour cela que l’on parle de jeu musical : il y a un un cadre dans lequel l’invention est le maître mot. La réserve d’expériences passées devient le point de départ d’une nouvelle expérience. C’est pour cela qu’il est possible d’écouter un morceau en boucle et de sentir
qu’il a une force à certains moments de notre vie. Comme une synchronisation entre le temps du morceau et le temps de notre vie personnelle.
La musique serait-elle le mouvement de la vie elle-même ? Normal donc d’être touché par toutes ces atmosphères dans laquelle passe toute vie. Irions-nous jusqu’à dire qu’un morceau de musique est l’expression d’une vie singulière ?

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